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L’ÉCRITURE ÉVOLUTIVE DES SUPER-HÉROS

1. Une écriture moins manichéenne

 

Au fur et à mesure de leurs différentes incarnations années après années, l’idée reçue présentant les super-héros au cinéma comme des « héros sans peur et sans reproche » « défendant la veuve et l’orphelin » s’est vite terni au profit d’une approche moins idéalisée et distincte du commun des mortels, au profit de l’humain et de ses questions existentielles.

 

a) Spider-Man

 

« Qui je suis ? Vous êtes sûr que vous voulez le savoir ? L’histoire de ma vie n’est pas faite pour les âmes sensibles ! Si quelqu’un a prétendu que c’était un gentil conte de fées... Si quelqu’un vous a dit que je n’étais qu’un type moyen, ordinaire qui ne s’en fait pas dans la vie, ce quelqu’un a menti... »

Peter Parker en ouverture de Spider-Man, Sam Raimi, 2002.

 

Dans la trilogie réalisée par Sam Raimi, le Tisseur de toile est, à l'image du comics, un adolescent, un lycéen qui vit le passage à l'âge adulte tout en développant des super-pouvoirs après avoir été mordu par une araignée génétiquement modifiée.
Suite au décès tragique de son oncle Ben, dont il est en partie responsable, Peter découvre l'immense responsabilité que lui incombent de telles capacités - dont il ne s'est pas servi pour sauver son oncle -. Avant de faire du bien commun, l'élément moteur de sa croisade, c'est la culpabilité qui guide l'orientation du héros.

 

« Quoi que je fasse... Quelque soit ma détermination... Ceux que j'aime, finiront toujours par payer ! »

Peter Parker, Spider-Man, Sam Raimi, 2002.

 

Peter a conscience qu'il ne peut pas sauver tout le monde et craint encore plus que les êtres qui lui sont chers subissent les conséquences de ses actes. C'est entre autres pour cette raison que le super-héros refoule ses sentiments. Son amour réfréné pour Mary-Jane dans Spider-Man 2 (2004) le tourmente et affecte ses pouvoirs à un point tel qu'il envisage de les abandonner.

 

« L’amour ne devrait jamais être secret. Si on garde quelque chose d’aussi compliqué de l’amour au fond de soi, ça peut rendre malade. »

Otto Octavius à Peter Parker, Spider-Man 2, Sam Raimi, 2004.

 

Il subit une grande crise d'identité, qui de Peter Parker ou de Spider-Man domine son existence ? Car ce pouvoir qui est en lui est à la fois un fardeau et un privilège.

 

« Quoi que puisse me réserver la vie, jamais je n’oublierai ces mots : « Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités... » J’ai reçu là un don... Une malédiction... Qui je suis ?... Je suis Spider-Man ! »

Peter Parker, monologue à la fin de Spider-Man, Sam Raimi, 2002.

 

Il comprend que la persévérance est ce qui lui permet d'accomplir son devoir, même si pour cela, il lui faut faire preuve d'abnégation.

b) Batman

À leurs premières heures, des super-héros comme Superman dans le film de Richard Donner (1978) apparaissent comme assez monodimensionnels, se contentant d’assurer la tâche que le scénario veut les voir accomplir. Il s’agit avant tout de porter les valeurs patriotiques de l’Amérique par des actes positifs et désintéressés qui n’ont qu’une fin en soi, la victoire du Bien sur le Mal. Le choix pour le héros est somme toute très simple, que veut-il devenir ? Un être de lumière ou bien un instrument de mort ? L’application d’un choix aussi manichéen trouve vite ses limites dans des personnages à la base plus contrastés dans les comics : Batman en est un bon exemple.

Le personnage, notamment avec la trilogie du réalisateur Christopher Nolan, laisse le héros libre d’exprimer ses émotions, mêmes les plus noires et les plus dangereuses. Dorénavant le super-héros n’est plus seulement une valeur positive pour le Bien, il met en application ses propres convictions qui forment un équilibre subtil avec lequel le personnage doit composer, s’il ne veut pas perdre son humanité.

 

« Non, non, non, non. Un justicier n’est qu’un homme égaré dans une course effrénée vers son autosatisfaction. On peut le détruire, ou l’enfermer... Si vous dépassez votre condition d’être humain, si vous vous consacrez entièrement à un idéal, et si vous êtes insaisissable, là seulement vous serez devenu autre chose... Une légende monsieur Wayne. »

Ra's al Ghul, Batman Begins, Christopher Nolan, 2005.

 

Dorénavant la vérité, la liberté et la justice doivent composer avec la vengeance, la peur et l’auto-justice. Cette approche, éloignée de la fantaisie habituelle à laquelle sont souvent associés les comics, ne fait en réalité que suivre l’évolution de la conjoncture historique dans laquelle sont sorties les bande-dessinées. Après les attentats du 11 septembre 2001, l’inconscient collectif américain doit retrouver foi en des symboles, et des personnages pour les incarner. Il ne s’agit plus d’une lutte entre de « méchants Nazis » et « les patriotes américains » sur un plan manichéen, il s’agit d’une lutte d’idées, la lutte contre le terrorisme entre autres.

Le jeune Bruce Wayne est entraîné par Ra's al Ghul aux arts martiaux et subit une discipline stricte. Ce dernier souhaite voir le jeune héritier de la maison des Wayne poursuivre sa vision violente de la justice. Mais le disciple préfère s'en tenir à un code d’honneur, de demeurer un hors-la-loi et incarner un symbole fort de peur et d’idéal.

 

« - Non, je suis pas un exécuteur !
- Ta pitié est une faiblesse que tes ennemis ne partageront pas !

- C’est pourquoi elle a tant d’importance, elle seule peut nous rendre différent !
- Tu veux combattre les criminels, cet homme est un meurtrier !
- Cet homme devrait être jugé !

- Par qui ? Un tas de bureaucrates corrompus ? Les criminels se moquent des lois de la société, tu le sais mieux que personne ! »

Bruce Wayne et Ra's al Ghul, Batman Begins, Christopher Nolan, 2005.

 

La question pour le super-héros n'est plus « qu’est-ce que je veux être ? » mais plutôt « quel genre de super-héros je veux être ? ». Nous sommes donc bien loin d’un modèle manichéen.


Récemment, les dernières versions de Batman portées à l'écran, au cinéma comme à la télévision, nous présentent un personnage marqué par une vie de combats, désabusé et meurtri, qui a perdu ses principaux repères et laisse exprimer sa rage.

 

« En vingt ans à Gotham, Alfred, on a bien vu ce que valent les promesses... Combien restent-ils de types biens ? Combien sont restés intègres ? »

Bruce Wayne, Batman v Superman : L’Aube de la justice, Zack Snyder, 2016.

 

« Un homme avisé a dit un jour : « Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même ! ». Je n’ai aucune idée du nombre de personnes que j’ai tué... »

Bruce Wayne de Terre-99 et Kate Kane, Batwoman (série 2019), saison 1 épisode 9, 2019.

 

Dans ces deux versions - chez Snyder et dans la série Batwoman - l'écriture met en avant un caractère ambigu chez le super-héros Batman, au-delà de tout manichéisme.

c) Quelques outsiders

Certains super-héros sont de bases ambigus de par l'absence d'une cause à défendre dans les combats qu'ils mènent, ce qui les rend assez imprévisibles et dangereux.

# Wolverine

Le mutant amnésique et indestructible - incarné par Hugh Jackman dans tous les films de la franchise X-Men -, doté d'un facteur auto-guérisseur, d'un squelette en alliage et de deux paires de griffes à chaque main, se rallie à des causes où la violence prime d'abord et avant tout. Traduit simplement, il est bourru, fume et boit. La finesse n'est pas son fort.

 

« Dans ma spécialité, je suis le meilleur. Bien sûr, ma spécialité c'est pas très jolie ! »

Wolverine, X-Men Origins : Wolverine, Gavin Hood, 2009.

 

Au cours des 3 volets qui lui sont consacrés, Hugh Jackman joue toutes les subtilités d'un homme qui se cherche, pour qui la justice existe, même si sa manière de la dispenser est parfois expéditive - à coups de poings ou de griffes -.

# Deadpool

Conçu à l'origine comme la parodie d'un personnage DC Comics - Deathstroke - Deadpool est présenté comme le modèle d'anti-héros chez Marvel. Le mercenaire aux capacités physiques accrues est extrêmement grossier, violent, imprévisible et blagueur outrancier - il n'a de cesse de briser continuellement le 4ème Mur avec le spectateur ou le lecteur -. Il ne connaît qu'un seul code de conduite, le sien. Si dans les comics c'est un état de fait établi, dans les deux films portés par l'acteur Ryan Reynolds (2016 et 2018), le personnage répond cependant d'un certain sens de la justice, en prenant soin de tout ramener à sa personne, car il se moque éperdument de ce qui est bien ou mal.

 

# V

 

« Un seul Verdict : la Vengeance. Une Vendetta telle une offrande VotiVe mais pas en Vain. Car sa Valeur et sa Véracité Viendront un jour faire Valoir le Vigilant et le Vertueux. »

V, V Pour Vendetta, James McTeigue, 2006.

 

Le personnage de V tel qu'il apparaît dans le film œuvre contre la dictature, la corruption et l'autorité. S'il se pose comme un étendard, l'incarnation d'une idée de la justice et de la liberté, il agit uniquement par vengeance. Il ne se limite pas à ce qui est bien ou mal mais seulement aux objectifs qu'il se fixe, même si cela le rend un peu plus inhumain aux yeux de Eve - a. k. a. Natalie Portman - sa complice.

2. Des thèmes d’actualités plus présents

Née dans une société encore jeune, la culture américaine est issue de la colonisation, des ethnocides, de l’esclavage, de l’indépendance et a développé un fort patriotisme ; les super-héros - eux-mêmes américains - ont semblent-ils toujours été voués à représenter et à porter les valeurs de l’idéal blanc, masculin, régies par les lois d’une société patriarcale.

Pourtant, lorsque l’on y regarde de plus près, les comics ne se sont pas toujours bornés à ce modèle. La remise en cause de tels fondamentaux dans le modèle américain, et par extension occidental, semble toute récente, dès lors qu’on se contente de l’observer par le prisme du cinéma. Il est vrai que, fort de la montée en puissance et de la popularité acquise de nombreux personnages témoignant de la variété dont Marvel et DC ont su faire preuve, le cinéma a été bien inspiré d’aller y chercher de nouveaux modèles.

Pour qui connaît peu, pas assez ou de très loin, l’univers des super-héros, la tendance à simplifier le genre à la seule existence de figures emblématiques comme Batman et Superman (DC Comics) ou Spider-Man (Marvel), trois modèles masculins blancs, est en réalité une vision très réductrice mais aussi révélatrice des époques, des mentalités et des évolutions du genre.

La plupart des super-héros - du fait de leur background, des exceptions comme Wolverine, Hulk ou Deadpool sont évidemment à exclure - défendent un ensemble d’idéaux, de valeurs comme la paix, la vérité et la justice. Des principes qui sont posés et prônés par le système américain comme étendards de vertu.

Mais comme tout phénomène de culture, les super-héros ont dû épouser les changements de la société américaine afin de ne plus se limiter à une vision étroite et dogmatique du monde.

Si tout un chacun peut se reconnaître dans ce système d’idéaux, certain.e.s dénoncent le maintien d’un tel panorama, au mépris de la diversité. Car oui, la diversité dans les comics, cela n’a jamais manqué.

a) De la diversité chez les super-héros

# Black Panther

Mis en avant dans des productions récentes, des super-héros aux origines ethniques diverses sont apparus sur nos écrans.

Black Panther est le premier super-héros noir de l'Histoire créé par Stan Lee et Jack Kirby dans les pages de Marvel, en 1966. Son arrivée inspirera la création d'autres symboles pour la communauté Afro-américaine. Le personnage de comics a dû faire face au partage de son patronyme avec le mouvement révolutionnaire de libération afro-américain, Le Black Panther Party (1966-1989). Débaptisé pendant un temps, le super-héros récupéra finalement son nom qui, même de nos jours, évoque encore une lutte acharnée que le super-héros n’a jamais eu vocation à promouvoir. Apparu une première fois dans le film Captain America : Civil War de Joe et Anthony Russo (2019), avant d'obtenir son propre film réalisé par Ryan Coogler en 2018, Black Panther n'est pas un super-héros d'origine afro-américaine mais le prince T'Challa venant d'un pays d'Afrique à la pointe de la technologie, le Wakanda.

 

« Il y a des millions d’années, une météorite faite de Vibranium, la matière la plus puissante de l’univers, s’écrasa sur le continent africain. Elle affecta toute la flore alentour. Plus tard, quand l’Homme est arrivé, cinq tribus se sont installées dans cette région et l’ont appelé Wakanda. Ces tribus étaient constamment en guerre les unes contre les autres, jusqu’au jour où un guerrier chamane reçut une vision de Bast, la déesse panthère. Elle lui fit découvrir l’Herbe-Cœur, une plante qui octroyait une force, une vitesse et une intuition surhumaine. Le guerrier devint roi et le premier Black Panther, le protecteur du Wakanda. Quatre des tribus prêtèrent allégeance au roi, mais la cinquième tribu, les Jabari, choisit d’aller se terrer dans les montagnes. Les Wakandais utilisèrent le Vibranium pour créer une technologie plus avancée qu’aucune autre nation. Mais tandis que le Wakanda prospérait, le reste du monde sombrait dans le chaos. Pour protéger le Vibranium, le peuple Wakandais fit le vœu de demeurer invisible, cachant ainsi son véritable pouvoir au monde extérieur. »

Le prince N’Jobu en ouverture de Black Panther, Ryan Coogler, 2018.

 

C'est une vision ouvertement plus positive et qui veut prendre à contre-sens la dimension colonialiste que l'on a souvent attribuée à l'Afrique. Le personnage incarné par feu Chadwick Boseman dirige une nation très puissante mais qui choisit de se cacher. Une situation remise en question par les amis du héros comme ses ennemis, ce qui l'amène à réfléchir sur la politique étrangère de son pays. Le film de Coogler soulève des dualités opposées en permanence, T'Challa doit-il d'abord être un roi ou un guerrier ? Le Wakanda doit-il s'ouvrir au monde ou rester un pays dissident ?

 

« - Tu voudrais que le Wakanda fasse quoi pour ces gens ?
- Partageons ce que nous avons. Nous pourrions fournir une aide, un accès à la technologie et un refuge à ceux qui en ont besoin. D’autres pays le font, on pourrait faire mieux.
- On est loin d’être comme ces autres pays, Nakia. Si le monde venait à découvrir ce que l’on est, ce que l’on possède... On pourrait perdre notre mode de vie.
»

Le prince T’Challa et Nakia, Black Panther, Ryan Coogler, 2018.

 

Si l'existence d'un tel super-héros au cinéma dénote de l'intention des studios de satisfaire et d'attirer un public plus large, qui pourra s'identifier à une figure de la diversité, le film prouve qu'il n'est pas nécessaire d'être d'origine africaine pour comprendre les enjeux et ressentir ce que le personnage éprouve.

 

# Falcon et le Soldat de l'Hiver

Deuxième série produite pour la plateforme Disney +, Falcon et le Soldat de l'Hiver - incarné respectivement par Anthony Mackie et Sebastian Stan - aborde la question de l'héritage du super-soldat américain et icône patriotique, Captain America.
Suite aux évènements du film Avengers : Endgame, réalisé par les frères Russo (2019), les deux coéquipiers du Captain, Sam Wilson - un afro-américain - et Bucky Barnes - un caucasien - après la retraite de ce dernier, doivent gérer sa succession et notamment qui héritera du fameux bouclier.

 

« - La seule chose qui me pose problème, c’est de devoir vivre dans un monde sans Captain America !
- Oh ben, justement (il sort son bouclier d’un étui)... Essaye-le ! (Sam saisit le bouclier) Ça fait quelle impression ?

- Que ça appartient à quelqu’un d’autre ! - C’est pas le cas !
- Merci ! Je ferai de mon mieux, Steve !
- C’est pour ça qu’il te revient !
»

Sam Wilson et Steve Rogers âgé, Avengers Endgame, A. et J. Russo, 2019.

 

Devant le refus de Sam de porter le bouclier, ne s'en estimant pas capable, le gouvernement se hâte de le récupérer et de le transmettre à un soldat sélectionné, John Walker, un homme blanc à l'image du Captain original.

 

« Un homme noir ne sera jamais Captain America ! »


Isaiah Bradley, Falcon et le Soldat de l'Hiver, 2021.

 

La remise en question sur la manière dont s'incarne une icône offre une avancée timide mais significative sur la diversité dans l'univers des super-héros. Au sein de la série, même les partis issus de la communauté afro-américaine ne cessent d'afficher un scepticisme devant Sam quant à une possible évolution du modèle américain qui leur soit favorable. Quand Falcon se résout à accepter le bouclier et à devenir le nouveau Captain America, c'est une nouvelle page qui s'écrit pour les années à venir.

b) La montée en puissance des super-héroïnes

Les adaptations des super-héroïnes à l'écran ont gagné en popularité ces dernières années. Avec le féminisme grandissant, les studios y ont vu une opportunité d'ouverture sur un public plus mixte avec une identification plus forte auprès des femmes.

 

« Pour moi, on est plus dans de l'Empowerment que dans une véritable démarche féministe. Ces héroïnes sont encore dépeintes selon des critères masculins. »

Erwan Cadoret

 

Il est vrai que Wonder Woman, la première super-héroïne, l’incarnation de la déesse guerrière et de la femme forte, a été créé par un homme, William Moulton Marston en 1941. D'abord incarné à la télévision en 1975 par Lynda Carter, le personnage arrive finalement sur grand écran en 2016, sous les traits de Gal Gadot dans Batman v Superman de Zack Snyder, avant d'obtenir en 2017 son premier film réalisé par Patty Jenkins.

 

« Elle demeure encore très princesse, comme un canon de beauté. Le jour où on aura une Wonder Woman potelée, on sera dans un état d'esprit plus féministe. »

Erwan Cadoret

 

Deux ans plus tôt, Supergirl, la cousine de Superman a droit à un renouveau à la télévision dans sa propre série, intégrée au Arrowverse où elle côtoie d'autres super-héros. Menée par Melissa Benoist dans le rôle-titre, elle compte à ce jour 6 saisons.

De son côté, Marvel, sur la plateforme Netflix, produit Jessica Jones, une série centrée sur la super-détective sarcastique, irascible et alcoolique. Une idée audacieuse qui appuie mieux l'idée du féminisme, chez les super-héroïnes.

 

« Jessica Jones de par ce qu'elle dégage, on peut tout à fait se l'imaginer allant aux toilettes, ce qui est moins le cas d'autres figures comme Wonder Woman, Captain Marvel,etc. »

Erwan Cadoret

 

À l'instar des comics, c'est « en les éprouvant au sein d'une équipe que certaines super-héroïnes se sont révélées ». C'est une des raisons pour lesquelles l'espionne Black Widow, incarné par Scarlett Johansson pendant 9 ans dans les différents films du MCU, a enfin droit à sa propre aventure en solo, réalisée par Cate Shortland, dont la sortie en salles est prévue le 7 juillet 2021.

Une autre héroïne, Captain Marvel, pour rebondir sur le succès retentissant de Wonder Woman chez DC, a également récemment obtenu sa première adaptation en long-métrage, co-réalisé par Anna Boden et Ryan Fleck.


Nous pouvons constater que la plupart de ses adaptations sont dirigées par des femmes comme pour appuyer au maximum une démarche féministe créative et artistique dans ces films.

En 2020, une nouvelle héroïne est adaptée à la télévision, Batwoman. Le personnage à l'orientation sexuelle clairement affirmée est présenté comme la porte-étendard de la communauté LGBTQ+.

 

« Là encore, c'est du business principalement. »

Erwan Cadoret

 

De manière surprenante, dans la représentation des genres et des sexualités, la télévision a quelques temps d'avance sur le cinéma. De nombreux personnages des séries du Arrowverse - que nous aborderons peu après - expriment leurs orientations tout naturellement, sans filtres.

c) Des super-héros parabole de la discrimination

Parmi les différentes catégories de super-héros portés à l’écran, il en est une qui s’appuie directement sur ce qui a fait de nous ce que nous sommes, c’est-à-dire des êtres humains, et sur notre place dans le vaste monde.
Comment en sommes-nous arrivés à ce stade ? Une réponse, la mutation génétique :

 

« La mutation... C’est la clé de notre évolution. C’est elle qui nous a menés de l’état de simples cellules à l’espèce dominante sur notre planète. Le processus est long et remonte à la Nuit des Temps. Mais tous les deux ou trois cent mille ans, l’Évolution fait un bond en avant. »

Charles Xavier en ouverture de X-Men, Bryan Singer, 2000.

 

L’idée première derrière la création du groupe de super-héros mutants, baptisé les X-Men par Stan Lee était d’échapper à une intervention extérieure - divine - qui serait à l’origine de ces super-personnages. Plutôt que de reprendre une figure mythologique et magique comme Thor, ou de les irradier à l’instar de Hulk, les 4 Fantastiques ou Spider-Man, Stan Lee a préféré une origine plus « innée » chez ses personnages.

Dans le cas des X-Men, il s’agit d’une mutation selon le sens « rare » de la modification génétique, et non « accidentelle ou provoquée » comme induit dans la définition classique - en ce sens-là, les personnages de Hulk et Spider-Man sont les fruits de mutations accidentelles par irradiation -.

Il y a donc cette volonté du créateur, et plus tard des scénaristes, que ce phénomène émane des personnages, même s’ils ne l’ont pas forcément désiré. Il y a un rapport évident établi entre autre avec la puberté où des changements s’opèrent, tant au niveau physique, psychologique et comportemental - lien souligné dans X-Men de Bryan Singer, 2000 -, et déstabilisent les individus :

 

« - On va faire court ! Le danger « Mutant » est-il réel ?
- C’est une question qui est mal posée, Sénateur Kelly. Après tout, une personne peut être dangereuse au volant d’une voiture !
- C’est pour ça qu’on a le permis de conduire !
- De conduire, mais pas de vivre ! Monsieur le Sénateur, il est reconnu que lorsqu’un Mutant prend sur lui de se révéler comme tel, il rencontre la peur, l’hostilité et parfois la violence. C’est à cause de cette intolérance que je demande au Sénat d’abandonner le Décret de Fichage des Mutants. Forcer ces Mutants à s’exposer au monde ne fera qu’aggraver les clivages...
- À s’exposer au monde ? Cette communauté de Mutants a-t-elle décidé d’appliquer le précepte « pour vivre heureux, vivons cachés » ?
- Je n’ai jamais dit qu’il fallait qu’ils se cachent !
- Eh bien, justement, on vous cache des choses, mademoiselle Grey ! J’ai ici une liste nominative de Mutants reconnus, et qui vivent ici aux Etats-Unis...

- Sénateur Kelly !...
- Il y a là une adolescente de l’Illinois qui peut traverser les murs. Qu’est-ce qui l’empêche de s’introduire dans une Salle des Coffres ?! Dans la Maison Blanche ?! Dans leurs maisons à eux (il désigne l’assemblée sénatoriale) ?!

- Sénateur Kelly !...
- Et plus d’une rumeur existe, mademoiselle Grey, faisant état de Mutants si puissants qu’ils peuvent pénétrer votre esprit, contrôler nos pensées, nous privant de ce droit sacré qu’est notre libre-arbitre ! Le peuple a le droit de choisir s’il envoie ses enfants à l’école avec des Mutants ou non ! S’il accepte ou non d’avoir des Mutants comme professeurs !
Mesdames et Messieurs, la vérité, la voici. Les Mutants sont une réalité. Et ils sont parmi vous. Nous devons savoir qui ils sont et surtout connaître leur potentiel de destruction !
»

Jean Grey et le Sénateur Kelly, X-Men, Bryan Singer, 2000.

 

C’est aussi sur cette période que l’identité sexuelle s’affirme et que la question du genre est également posée. C’est le regard que nous avons sur nous-mêmes, et celui des autres, qui commencent à nous définir. Il est possible de souligner une autre mise en allégorie derrière la présentation de personnages qui choisissent, pour certains, de vivre dans la clandestinité comme ont pu l’être à d’autres époques - différentes d’aujourd’hui - les homosexuels, les juifs, etc. La liste ne s’arrête pas là. Dénoncés, exhibés, tourmentés par l’intolérance, la méfiance et la haine, autant de faits avérés que Bryan Singer et les autres réalisateurs ayant travaillé sur la franchise X-Men au cinéma ont souhaité mettre en avant :

 

« Les Mutants... Depuis que leur existence est connue, ils ont suscité la peur, la méfiance, voire la haine ! Le débat divise la planète... Les Mutants représentent-ils le prochain stade de l’Évolution ? Ou s’agit-il d’une nouvelle Humanité parallèle qui revendique sa part du monde ? Quoi qu’il en soit, c’est un fait historique, partager le monde n’a jamais été la vocation de l’Homme ! »

Charles Xavier en ouverture de X-Men 2, Bryan Singer, 2003.

 

Parmi la palette de personnages qui constituent l’univers des X-Men, le degré de manifestation de mutation n’est pas toujours égal. Certains dissimulent leurs capacités derrière une simple apparence :

 

Tandis que d’autres doivent avoir recours au subterfuge et au déguisement pour se cacher du regard du monde extérieur :

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Mais au sein de cette galerie mutante, deux factions s’opposent en face-à-face sur leur devenir au sein de l’humanité, les gens ordinaires. À l’instar de figures emblématiques du mouvement de lutte pour les droits des Afro-américains comme Martin Luther King et Malcom X, le camp des X-Men, mené par le professeur Xavier, qui prône la tolérance, la discrétion et la paix ; et la Confrérie, mené par Magnéto, motivé par la haine, la guerre et la suprématie des mutants, sont une parabole des conflits sociaux de notre société. Notons que les similarités dans la composition des prénoms dénotent de la dimension métaphorique de ces personnages - Martin Luther King / Charles Francis Xavier ; Malcom X / Magnéto -.

 

« - Vous savez aussi que je ne cède pas sous la menace !
- Monsieur le Président, ceci n’est pas une menace, c’est une opportunité ! Il y a des forces en ce monde, chez les Mutants comme chez les gens ordinaires, qui sont persuadés qu’une guerre est imminente. Vous verrez dans ces dossiers que certains se sont déjà employés à la déclencher, et il y a eu des pertes, lourdes, des deux côtés... Monsieur le Président, il y a du vrai dans ce que vous direz au monde, c’est un moment historique, le moment de répéter les erreurs du passé ou de travailler ensemble à un avenir meilleur... Nous serons toujours là, Monsieur le Président, la balle est dans votre camp !
»

Charles Xavier et le président des États-Unis, X-Men 2, Bryan Singer, 2003.

 

Ce que la saga X-Men souligne, c'est la facilité avec laquelle nous cultivons la méfiance vis-à-vis de ce qui nous est étranger, et comment les discriminés peuvent être amenés à réagir.

3. Les univers étendus, entre la série et le cinéma, un style proche des comics

Grâce aux larges catalogues respectifs des grandes licences Marvel et DC, les lecteurs, et par extension les spectateurs, n’espèrent qu’une chose : que leurs héros puissent se croiser. Dans les bandes dessinées de base, cela a conduit à la naissance des collections comme les X-Men, les Avengers (chez Marvel) ou la Justice League (chez DC), pour ne citer que les plus connus.

Avant de pouvoir réunir ces personnages dans un univers scénaristique commun, il a fallu d’abord leur laisser le temps d’arriver, de développer leur propre mythologie, et de gagner en popularité auprès du public. Ce fût les cas dans les bandes dessinées, et les films suivirent le même exemple.

Les corpus de chaque maison d’éditions - Marvel ou DC - ont conditionné la naissance d’univers étendus narratifs. Leurs constitutions sont le fruit d'un travail qui s'est développé avec le temps.

On ne s’en doute pas toujours mais en réalité, certains des personnages qui nous sont proposés aujourd’hui sont des créations encore assez récentes dans les comics - l'équipe du film Les Gardiens de la galaxie n'existe que depuis 2008 -. Pour les studios de production, prendre des risques sur des personnages issus d’un genre encore récent est assez risqué.

 

« Les univers étendus ont pu voir le jour car avant on ne disposait pas d'un corpus de personnages aussi important. »

Erwan Cadoret.

 

À partir du moment où le catalogue des personnages de chaque licence a été suffisamment varié et que des premières tentatives d'adaptations se sont révélées fructueuses, les sociétés de production (Sony, Fox, Warner pour ne citer que ces exemples) ont commencé à cerner le potentiel industriel et cinématographique de ces univers et à acheter les droits.

 

a) Le Marvel Cinematic Universe

Au cinéma, le premier univers étendu qui a lancé la mode et inspiré ce nouveau format narratif a été le Marvel Cinematic Universe. Il a été développé par Marvel Studios, la société de production directement contrôlée par la société d’éditions Marvel, qui détient la majorité des droits sur les super-héros liés à la licence du groupe phare de ses comics, les Avengers.

C'est à partir d'un petit clin d'œil que tout commença en 2008. Je fais référence à la fin du générique du film Iron Man réalisé par Jon Favreau cette année-là. Dans cette scène, le super-héros éponyme (Tony Stark a.k.a. Iron Man) reçoit la visite d’un mystérieux individu :

 

« - Je suis Iron Man ! Vous vous prenez pour le seul super-héros du monde ? Monsieur Stark, vous faites maintenant partie d’un plus grand univers, même si vous ne le savez pas encore...
- Putain, vous êtes qui vous ?

- Nick Fury, directeur du SHIELD !
- Ah !
- Je viens vous parler des Vengeurs et du projet Initiative !
»

Nick Fury et Tony Stark, Iron Man, Jon Favreau, 2008.

 

À travers cette séquence post-générique et la dernière phrase prononcée, le studio Marvel Studios, dont c’était la première production officielle, ne préparait pas le terrain pour une éventuelle suite - qui arrivera avec Iron Man 2 -. Il annonçait un vaste ensemble de films liés entre eux et partageant la même diégèse, la même arène scénaristique. Le spectateur avisé sait que cette « Initiative Avengers » annonçait l’arrivée de personnages phares comme Captain America, Hulk, Doctor Strange, Black Panther, pour ne citer que les plus connus.

Si le film Iron Man, produit par Marvel Studios, n’avait pas fonctionné au box office, jamais le jeune studio n’aurait tout risqué pour poursuivre et porter à l’écran la majorité du catalogue des personnages Marvel qu’il détient. Jamais il n’aurait cherché à donner vie quelques années plus tard aux Avengers.

Mais avant qu’un tel film n’arrive et pour de ne pas égarer le spectateur dans la trame narrative de son univers étendu, Marvel Studios devait d’abord développer ces super-héros. Pour développer une relation intime entre lui et les personnages, le Studio a commencé par produire des aventures individuelles focalisées sur les parcours respectifs de chaque personnage, avant de les réunir quelques années plus tard.

Au-delà de ce temps de développement, il fallait penser cette rencontre et cette narration sur le long terme. Tout cela devait s'inscrire dans une logique scénaristique, en limitant les incohérences. C’est ainsi que Marvel Studios (et plus tard Disney) mit au point une narration de format sériel : ici une vaste intrigue principale domine l’ensemble de cet univers étendu, tout en faisant en sorte que chaque film développe sa propre histoire. L’univers étendu ne fonctionne que si les intrigues secondaires et tertiaires finissent au bout d’un moment par rejoindre l’intrigue principale. Par exemple, au cours de la Phase 1, nous avons eu droit aux origin stories de Iron Man, Captain, Thor et Hulk. Tous ont été approchés par l'agence du S.H.I.E.L.D. au cours de leurs aventures. C'est cette dernière qui viendra tous les recruter pour le film Avengers.

 

Afin de marquer chaque temps fort dans l’évolution de ces personnages, Marvel Studios a décidé de découper sa narration en phase. Chacune d’elles mène à un film groupe, un opus des Avengers, réunissant tous les héros développés en amont, qui vient conclure une phase pour en amener une autre (cf. annexe 2 : Le Marvel Cinematic Universe).

C’est ainsi qu’est née « la Saga de l’Infini ». Développée pendant 11 ans, de 2008 à 2019, elle correspond aux 3 phases qui ont permis à chaque fois d’introduire de nouveaux personnages. D’abord les principaux - pendant la Phase 1 -, puis quelques nouveaux - avec des têtes inconnues comme les Gardiens de la Galaxie -, et enfin d’autres - plus connus et diversifiés comme Doctor Strange, Spider-Man, Black Panther, etc. -.

« La Saga de l’Infini » tourne autour de plusieurs MacGuffin, les Pierres d'Infinité, que les héros doivent réunir et protéger d'un ennemi qu'ils ne connaissent pas encore mais dont l'existence sera révélée au fur et à mesure des films et de la narration, le Titan Thanos - incarné par Josh Brolin -.

Ainsi, Marvel Studios a mis au point une formule qui joue sur l’attente, la frustration et la récurrence. Pour avancer un peu plus dans l’intrigue, la comprendre, ou voir le prochain personnage se présenter, il faut attendre l’arrivée du film suivant en salles.

Comme la sauce a commencé à prendre, du fait des 5/6 films qui sont sortis, juste avant le film groupé, les spectateurs - les plus assidus - sont présents au rendez-vous avec enthousiasme.


Cette formule a fait ses preuves. Grâce au format sériel, qui n’est pas sans rappeler celui des comics, Marvel a construit une architecture dont les ramifications semblent complexes, parfois fragiles - les petites incohérences ne sont pas toujours évités -, mais dont le tout, chapeauté par un seul studio (et par un seul homme, Kevin Feige, producteur chez Marvel Studios) a permis à la licence Marvel de s’assurer une place de choix dans le paysage cinématographique, et ceux pour encore de nombreuses années.

En 2012, le MCU s'est étendu avec des séries produites en collaboration avec Netflix - Daredevil, Jessica Jones - tandis que d'autres ont joui d'une diffusion télévisée comme Les Agents du SHIELD sur la chaîne ABC ; l'occasion de présenter des personnages inédits.

Au début de l'année 2021, pour compenser la fermeture de salles de cinéma, de nouvelles séries destinées exclusivement à la plateforme Disney + - WandaVision, Falcon et le Soldat de l'Hiver, Loki - mettant en scène les super-héros découverts sur le grand écran ont commencé à être diffusées.

b) Le DC Extended Universe

Si Marvel a lancé une méthode de production industrielle, et un style de narration assez révolutionnaire pour l’époque, son concurrent direct dans les adaptations de comics, DC, a été inspiré pour l’imiter, non sans mal et pas tout à fait avec la même stabilité et confiance.

D’un point de vue purement industriel, la maison d’éditions DC Comics possède un avantage sur son concurrent Marvel. En effet, a contrario de celle-ci, les droits d’adaptations de tout son panthéon super-héroïque est détenu par un seul et même studio, beaucoup plus ancien que Marvel Studio, la Warner Company.

Pour rappel, jusqu’en 2018, Marvel Studios ne possédait pas les droits de ses propres personnages comme Spider-Man, les X-Men, les Quatres Fantastiques, détenus respectivement jusque-là par Sony et la Century Fox.

Mais ce qui se présentait comme un avantage pour Warner ne s’est pas révélé bénéfique quand DC a décidé de lancer son propre univers étendu, regroupant tous ses super-héros phares en un groupe, la Justice League (équipe incluant Superman, Batman, Wonder Woman, Flash, etc.).

Car Warner devait faire face à un objectif de taille, le retard dans la course aux super-héros. En effet, lorsqu’il décide avec Man of Steel, réalisé par Zack Snyder en 2013, de lancer son univers Justice League, il arrive avec déjà 5 ans de retard.
À ce stade-là, Marvel Studios, qui venait d’être acquis par Disney, achevait sa Phase 1 avec le premier film Avengers, et démarrait déjà sa Phase 2. Le public connaissait à présent l’existence de 5/6 super-héros Marvel. DC commençait tout juste en rebootant Superman.

Dans une dynamique assez précipitée, Warner et DC n'ont pas pris le temps de poser des bases solides pour tous leurs personnages. Les films de groupe ou d'affrontement comme Justice League de Joss Whedon (2017) ou Batman v Superman de Zack Snyder (2016) sont arrivés avant les aventures individuelles de super-héros comme Flash, Aquaman ou Cyborg.

Le virage pris par le film Justice League remanié par Joss Whedon - au départ réalisé par Snyder - a mis le DCEU dans une position instable quant au maintien de ses choix esthétiques et du ton employé dans ses films. La forte influence de la formule utilisée par Marvel dans son MCU s'en ressent. Dans l'esprit des spectateurs, la confusion persiste alors que la Snyder Cut du film Justice League, telle que Zack Snyder l'avait imaginé lui-même, est sortie au début de l'année 2021. La cohérence scénaristique et visuelle du DCEU est loin d'être définitivement fixée. Des films du même univers comme Shazam, Birds of Prey, The Suicide Squad - annoncé pour le 28 juillet 2021 - viennent confirmer ces contradictions.

c) Le Arrowverse

La chaîne CW, rattachée au studio Warner, a lancé en 2012, la série Arrow adaptant les aventures du célèbre archer DC Comics, Green Arrow a.k.a. Oliver Queen. Du fait de l'engouement pour la série, le budget augmentant avec le succès, la chaîne commence à mettre en place une nouvelle série en 2014, dérivée de la première, consacrée au super-sonique Flash dont le héros, Barry Allen, fut introduit au cours de la deuxième saison d'Arrow. Une fois ses deux séries - aux tons bien distincts - installées, la chaîne commença à écrire des épisodes crossover, diffusés chaque année début décembre, vers les mi-saisons.

Les deux séries ayant introduites un petit nombre de personnages secondaires et exploitables, ces derniers hériteront d'une série, DC's Legends of Tomorrow, qui les verra voyager dans le temps. Une série consacrée au sorcier Constantine sera annulée après une seule saison. Le développement des mythologies respectives de Arrow et surtout de Flash amènent les scénaristes à explorer le multivers, qui permet d'intégrer rétro-narrativement la série Supergirl, - diffusée sur la chaîne CBS ; que CW finira par récupérer - moyennant une ruse scénaristique. Peu après, en 2018, la série Black Lightning est lancée, d'abord de son côté puis sera également intégrée rétro-narrativement au Arrowverse, au cours d'un crossover.

En 2020, la série sur la super-héroïne Batwoman est mise en place dans le même univers que Arrow et Flash.

Suite au crossover annuel de la même année « Crise sur les Terres Infinies », suivant la trame des comics, le multivers télévisuel est refondu. D'un point de vue narratif, toutes les séries citées précédemment se déroulent sur la même Terre ; ce qui peut faciliter l'écriture et la mise en place de nouveaux crossovers. Cette année, une série dérivée de Supergirl, Superman et Lois, dont les deux personnages ont été introduits dans le show initial, vient d'être lancée.

Cette construction scénaristique progressive et retravaillée a permis de créer un univers - avec une variété de tons - narratif et cohérent offrant une libre-circulation à ses personnages. Il en devient certes complexe mais c'est là un reflet assez fidèle du matériel d'origine, les comics.

@2021 Martin Bucci

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